Cibler les mitochondries pour révolutionner les traitements médicaux

De gauche à droite: Mathias Wenes (CTO), Raphaël Martinou (CEO), Augustin de Bettignies (CBO) et Jean-Claude Martinou (CSO)

Issue d’un laboratoire de l’Université de Genève, MPC Therapeutics exploite le potentiel des mitochondries pour révolutionner les traitements médicaux afin de lutter contre des maladies telles que le cancer ou Alzheimer. L’histoire d’une découverte scientifique retentissante qui aboutit à une start-up biotech innovante.

Du laboratoire à la start-up

En 2012, le professeur Jean-Claude Martinou et son équipe, de l’Université de Genève, font une découverte scientifique remarquable. Le groupe identifie une protéine au sein de la mitochondrie: le transporteur mitochondrial du pyruvate (Mitochondrial Pyruvate Carrier, MPC), élément clé de la production d’énergie cellulaire. Pour produire de l’énergie, les cellules utilisent principalement du glucose converti en pyruvate. Ce pyruvate va ensuite être importé par le MPC dans la mitochondrie, la «centrale énergétique» de la cellule. En tant que seul point d’entrée du pyruvate dans la matrice mitochondriale, le MPC constitue une cible clé pour moduler la production d’énergie cellulaire.

Cette découverte a un grand écho dans la communauté scientifique et de nombreux laboratoires s’intéressent à la protéine, montrant que le fait de bloquer le MPC est une stratégie thérapeutique prometteuse contre diverses maladies, telles que le cancer, la fibrose du foie ou pour régénérer certains types de cellules. Le professeur Martinou, lui, poursuit ses recherches pour développer une série de molécules capables d’inhiber le MPC chez l’humain. Il obtient les premiers résultats concluants en 2018. Raphaël Martinou, fils du chercheur, crée alors la start-up MPC Therapeutics afin de valoriser ces découvertes et d’exploiter leur potentiel médical. «Il fallait créer une start-up pour pouvoir candidater à des fonds tels qu’Innosuisse et sortir la recherche du laboratoire», explique Raphaël Martinou.

Une molécule et trois axes de recherche

MPC Therapeutics a aujourd’hui un lead compound (une molécule qui peut être utilisée dans le cadre médical) et explore ses applications dans trois programmes de recherche. Le premier programme s’est concentré sur les applications de la molécule dans les thérapies cellulaires contre le cancer, en particulier les thérapies CAR-T. La molécule développée par la start-up est utilisée lors de la fabrication ex vivo des cellules CAR-T pour augmenter la proportion de cellules-souches à effet mémoire, un phénotype associé à de meilleurs résultats cliniques, notamment une plus grande efficacité pour détruire les tumeurs et prévenir la récidive du cancer. La molécule est ensuite retirée avant que les cellules CAR-T soient réinjectées aux patient·es. Ce premier programme est actuellement en phase de test par une dizaine d’entreprises actives dans les thérapies cellulaires et pourrait être intégré à leurs processus de multiplication des cellules CAR-T.

C’est enthousiasmant parce que nous sommes en phase de délivrer ce premier projet à l’industrie, ce qui devrait nous permettre d’obtenir des revenus très prochainement, en 2025 ou 2026. C’est particulièrement rapide pour une start-up biotech et je tiens à remercier ceux qui nous ont soutenus, notamment l’Unige, Innosuisse et Alliance.

Raphaël Martinou

CEO de MPC Therapeutics

Le second programme de recherche de la start-up explore les applications de l’inhibition du MPC dans le cadre de la maladie d’Alzheimer. Cette recherche a démarré en 2024, financée par Innosuisse et la fondation Roger De Spoelberch, en collaboration avec le laboratoire de Marlen Knobloch au CHUV (Centre Hospitalier Universitaire Vaudois). Le dernier projet, en collaboration avec l’Université de Genève, se concentre sur les propriétés anti-fibrotiques de la molécule développée par MPC Therapeutics.

L’accès au financement, le principal défi du développement d’une start-up

En 2023, Mathias Wenes, associé de Raphaël Martinou, entend parler du concours Source d’innovation, organisé par l’association Alliance, et y participe. C’est à cette occasion que la start-up devient membre de l’association Alliance. Elle sera suivie par la conseillère en innovation Elise Gortchacow-Bretton. «Elise nous accompagne pour le montage de projets Innosuisse. C’est un montage financier, budgétaire, stratégique aussi» explique Raphaël Martinou. La même année, MPC Therapeutics prépare avec l’aide d’Elise Gortchacow-Bretton une demande Innosuisse afin de financer leur second programme de recherche contre la maladie d’Alzheimer. Une première réunion est organisée pour définir les tenants et les aboutissants du projet avec toutes les personnes impliquées, puis vient l’étape de la rédaction du dossier. «C’est un processus itératif. Elise nous fait des commentaires, nous les intégrons et lui envoyons une nouvelle version, qu’elle commente. Il y a ainsi eu trois versions du dossier avant d’arriver à celle qui sera finalement déposée auprès d’Innosuisse, raconte Raphaël Martinou.» Le dossier est accepté et un nouveau projet Innosuisse est en préparation pour la recherche sur la fibrose, toujours soutenu par Elise Gortchacow-Bretton.

Si les financements Innosuisse sont une aide importante pour les entreprises, ils ne sont pas toujours suffisants. MPC Therapeutics prépare en ce mois de mars une nouvelle levée de fonds qui leur permettra, d’une part d’atteindre le point de commercialisation de leur molécule dans le programme CAR-T, et d’autre part d’accélérer leur développement dans le programme sur la fibrose. «Le plus grand défi, c’est le financement de l’entreprise, particulièrement lorsque l’on démarre. Les investissements de type venture capital (capital-risque) n’interviennent qu’à un certain point de maturité de la start-up. Et nous ne sommes pas encore à ce point-là, nous devons donc trouver des financements alternatifs, comme les business angels ou les fonds étatiques. On en parle peu, mais l’État joue un rôle clé dans l’amorçage de projets d’innovation grâce à ces financements Innosuisse» explique Raphaël Martinou.

MPC Therapeutics, aujourd’hui et demain

MPC Therapeutics a aujourd’hui un premier produit en phase d’industrialisation, qui permet de renforcer les thérapies cellulaires contre le cancer. «C’est une grande réussite pour nous, s’enthousiasme Raphaël Martinou, car cela montre que nous créons de la valeur pour l’industrie. Nous faisons de la recherche qui pourra bénéficier aux patient·es dans un avenir très proche.» C’est cet état d’esprit qui guide MPC Therapeutics, cette volonté de poursuivre leur recherche sur d’autres projets, certes plus complexes, mais qui à moyen long terme pourront sortir du laboratoire et aider les personnes atteintes de maladies graves.

MPC Therapeutics en bref

Fondation : 2018

Siège social : Genève

Équipe : 6 personnes

Site Internet : mpc-therapeutics.com